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L'Eglise Aristotelicienne Romaine The Roman and Aristotelic Church Forum RP de l'Eglise Aristotelicienne du jeu en ligne RR Forum RP for the Aristotelic Church of the RK online game 
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Navigius

Inscrit le: 18 Sep 2007 Messages: 2965 Localisation: Orléans, Orléans
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Posté le: Mer Juin 23, 2010 12:20 am Sujet du message: [RP] Vers le sourire de Valentina |
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[HRP: Voici le RP de la fin de Navigius di Carrenza. Que tout les joueurs voulant y participer s'y intègre, ce sera un plaisir de clore ce chapitre important de ma vie en votre compagnie ]
Le mal le guettait, il le sentait. Entre ses délires d'agonie et ses quelques moments de lucidité, le prélat auscitain était tourmenté par les visages fantomatiques d'une génération révolue. Les signes avaient commencés à Paris, ou lors d'un discours devant la Maison Ecclésiastique du Roy de France, une vive douleur à la tête lui avait pris. Il avait babillé un instant, des mots confus incompréhensibles sauf de lui-même, avant de se retirer, inopinément. Surmenage, les médicastres lui avaient-dit, si bien qu'on l'avait convaincu de prendre quelques jours de repos dans la campagne entourant Auch, sa ville d'adoption.
Hélas, alors qu'il traversait la Guyenne, le mal était revenu, plus fort et plus tenace. La sueur avait perlé sur son front, puis les fièvres, suivies de longues périodes d'inconscience, entrecoupées par d'affreux cauchemars. Si c'était cela la mort, elle était bien moins belle qu'on l'eût espéré. À peine arrivé à Auch, l'avait t'on entendu geindre. Il avait réclamé les leçons de Saint-Ripolin, un vieil ouvrage dans lequel il trouvait solace et paix. Puis, il s'était exprimé, brièvement, devant son personnel, un moment touchant alors qu'il libéra de son services plusieurs domestiques qui après tant d'année, reçurent une large compensation, car l'homme était bon. Puis ce furent les mêmes mots, plaintifs.
- Modena, Modena, Modena, portami a casa dei miei antenati *
Et le cortège s'était mis en route, sachant que l'homme qui pendant tant d'année s'était tenu droit et fier pour tous, n'en avait aujourd'hui que pour quelques jours, deux semaines bien comptées tout au plus. La route ne lui paru point longue, car tout ce qui défilait sous ses yeux lui semblait intéressant, c'est généralement ce qui arrivait lorsque l'on traversait une contrée pour la dernière fois. Dans sa démence, un petit sourire pointait à son visage, car son Italie natale s'approchait, pays de richesse et de chaleur, alors que la France, qu'il avait servi et tant aimé, était grise, pauvre et épuisantes.
Dans le cortège, sa sœur puînée, Éliséa Di Carrenza, portait les vêtements noirs du deuil, tenant en ses bras deux nourissons vieux de quelques semaines. Son époux, Thomas de Montfort, avait été pris de fièvres si forte qu'il était allé rejoindre Dieu avant même de pouvoir connaître son fils et sa fille. Elle dictait maintes lettres qui partaient par des chevaucheurs de la maison vers Rome, afin de faire mander certaines personnes.
Citation: | À l'attention de Monseigneur Wilgeforte de Toretta-Granitola,
Que nous espérons désormais Archevêque D'Avignon,
Monseigneur,
Il m'incombe de vous annoncer la triste nouvelle. Monseigneur Navigius di Carrenza, qui fut jadis Archevêque Métropolitain d'Auch et Grand Aumônier de France, est aujourd'hui mourant, pris de maintes douleurs alors que son corps et son esprit lui font défaut en ces dernières heures terrestres. Nous le menons à la Maison de nos ancêtres, en bordure de Modena, afin qu'il puisse y reposer pour ses derniers instants.
Connaissant l'amitié profonde qui vous liaient, nous tenions à vous faire savoir qu'il vous réclâma pendant de longues heures et que votre présence sera requise pour l'exécution testamentaire de ses biens, dont vous êtes l'une des bénéficiaires.
Puisse Aristote vous permettre d'arriver à temps,
Endeuillée mais serviable,
Éliséa Di Carrenza |
-Va! Porte cette lettre à Avignon, c'est sur notre chemin!
* Modène, Modène, menez-moi à Modène dans la maison de mes aïeux. _________________ Évêque Suffragant d'Orléans
"Sic nos sic sacra tuemur" |
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Sainte Wilgeforte

Inscrit le: 17 Juil 2009 Messages: 6071
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Posté le: Mer Juin 23, 2010 11:23 am Sujet du message: |
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Bande-son
Au fond, Wilgeforte était seule. Elle avait beau être à la tête d’une congrégation entière et diriger un nombre incalculable de préfectures et d’offices, elle restait désespérément seule. Exceptionnellement douée en gestion des ressources humaines, elle était catastrophiquement handicapée dès lors qu’il s’agissait de sortir du cadre professionnel et d’entrer dans le relationnel. Était-ce dû à son éducation ou à son caractère ? À son inné ou à son acquis ? À son « moi » ou à son « surmoi » ? Sans doute aux deux. Sans doute ne le saurait-elle jamais. La part de l’un et de l’autre étaient déterminés par Lui, et elle ne pouvait qu’en constater le résultat : nouer un lien avec un être humain était pour elle du domaine de l’impossible.
Sauf avec certains. Il est de notoriété publique que toute règle appelle une exception, ce qui impliquait donc que certaines personnes permettent à Wilgeforte de ne pas être un total cancre des relations. Ou plutôt de ne pas être un pire cancre que ce qu’elle n’était déjà.
Navigius di Carrenza était de ceux-là.
Était-ce leurs origines qui les rapprochaient ? Était-ce leurs caractères qui, antipodaux sur certains points et semblables sur d’autres qui les rendait si complémentaire ? Ou était-ce dû à un quelconque dénominateur commun dont ni l’un ni l’autre ne supposait l’existence ? Ici aussi, Lui seul avait la réponse. Toujours est-il que la relation que Wilgeforte entretenait avec Navigius était unique et exceptionnellement forte. Non que les deux clercs tombaient sempiternellement d’accord : au contraire, il n’était pas rare que, au cours de leurs divers entretiens, que l’un éclate et lâche un « Che ghe vegna la giandussa ! » ou un autre mot doux dont leur langue maternelle regorge. Après tout, ils étaient deux méridionaux et, en dépit de la pâle couleur de Wilgeforte, tous deux avaient le sang chaud.
Mais le plus important était sans nul doute cette réalité : grâce à Navigius, Wilgeforte n’était pas seule. Du moins, pas entièrement.
C’est à tout cela que la Sicilienne pensait dans le carrosse qui la menait à Modène. Seule dans sa vie, seule dans ses palais et seule dans ses fiacres splendides. Son regard oscillait entre la contemplation de quelque invisible absolu et la perdition dans le vide intersidéral. Elle passait ses journées à étudier le divin et à se mettre à Son service et, à chacune de Ses décisions inattendues, était surprise comme une jouvencelle.
Elle bénissait ses précepteurs et ses parents : ils lui avaient, dès son plus jeune âge, inculqué qu’une femme laissant transparaître ses émotions est odieuse. Ils lui avaient dit sans lui expliquer, lui avaient demandé et même ordonner de l’assimiler sans aller voir plus loin, par dogmatisme, et de l’appliquer. Plus par souci de ne pas décevoir que par crainte des réprimandes, elle avait appliqué ce principe qu’elle jugeait absurde. Aujourd’hui, elle se rendait compte que, sans cette éducation, elle serait une victime et une proie. Grâce à son éducation et aussi grâce à son caractère, elle était parvenue à se créer une carapace qui n’avait été percée que quelques sporadiques fois depuis son arrivée en France. En dissimulant ses moments de peine, de joie ou de doute, elle était parvenue à se forger une réputation qui, à défaut de la rendre populaire, lui offrait une certaine paix et, surtout, la tenait éloignée des gens.
L’enfer, pour la pâle Sicilienne plus que pour tout autre peut-être, c’est les autres.
La perte de Navigius serait une nouvelle épreuve. Wilgeforte était jeune et avait pourtant déjà tellement vécu. « Je suis jeune et pourtant très vieux », écrit le génial Baudelaire. Ces vers auraient pu être de la plume de la Sicilienne. Le retour en des terres qu’elle affectionnait — l’Italie était une espèce de Sicile moins grandiose, mais une Sicile tout de même — ne lui procurait aucune joie et ne rendait pas moins morose cette funeste expédition.
Il était encore trop tôt pour se poser des questions, mais Wilgeforte savait qu’elle allait gamberger, que ça allait la faire souffrir, qu’elle allait vouloir s’empêcher de penser à tout cela, qu’elle n’y arriverait pas et que cela le ferait souffrir encore plus. Elle avait traversé tout cela lors de la mort de Jehan Méléagant et elle savait que le schéma serait le même cette fois-ci. Avec une épreuve supplémentaire : celle de devoir dire adieu. Elle avait toujours détesté cela. Mais j’aurais l’occasion d’y revenir.
Pour l’heure, Wilgeforte descend de son carrosse, ne prend aucun plaisir à humer cet air adoré et se fait annoncer. _________________
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Navigius

Inscrit le: 18 Sep 2007 Messages: 2965 Localisation: Orléans, Orléans
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Posté le: Mer Juin 23, 2010 11:46 am Sujet du message: |
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Le prélat se trouvait en grande conversation dans sa chambre. Sur sa gauche, toujours le sourire aux lèvres, était assis Monseigneur Lodovicus, fantômatique et d'une pâleur à faire mourir d'envie la pureté elle-même. De l'autre côté, adossé au mantel de la cheminée, se trouvait le Prince Juliano di Juliani, visiblement revenu d'entre les morts pour l'occasion. Les trois compères discutaient ensemble de la crise artésienne.
- Le peuple s'agite, Monseigneur, le peuple s'agitte, déjà il est aux portes de votre domaine avec ses piques.
- C'est la faute de la Ponthieu! Murmura Lodovicus
- Nous avons failli à ce peuple qui réclâme sa vengeance! Sussura le prélat.
- Mais non, il vous faut être fort Monseigneur, l'Artois doit être maté, sinon demain ce sera le Royaume qui sera à feu et à sang. Mentionna le Chevalier de Rambouillet.
- Vous avez sans doute raison, votre Altesse, mais que faire, que faire, même le bûcher ne les effraient plus! Gémit le prélat.
- Une seule solution, Navigius mon ami, la trahison.
Lodovicus demeurait pensif. Son regard était perplexe et l'italien sentait que son maître le jugerait sur sa décision.
- Que vas-tu faire, Navigius. Vas-tu choisir de défendre tes paroissiens et prendre leur parti en leur insufflant modération? Ou au contraire, prendras-tu le dur camp de cette Majesté sourde à leur supplique?
L'italien suait à grosses gouttes désormais. Tourmenté qu'il était, il se releva dans son lit et adressa sa réponse à ses deux compères.
- Le bien du Royaume exige des sacrifices. Je ne pourrais me résoudre à voir cette fronde contre sa Majesté mettre à mal l'unité du Royaume, car hormis Dieu, elle seule pourra les préserver de la guerre et de la mort.
Lodovicus eût une expression de déni.
- Tu as donc tracé ton chemin, Navigius, un chemin qui te mènera vers la gloire et la puissance, mais le coût en sera ton innocence. Avant la fin, tu le regretteras.
Dans l'autre pièce, la jeune italienne brodait, attendant l'arrivée d'une invitée mandée par le prélat. Depuis des heures, il criait, au travers des murs, des mots incompréhensibles, clâmant une innocence qu'elle ne comprenait pas. La scène était triste pour tous, si bien qu'elle avait chassé le reste de la famille, parti prendre une marche dans les alentours, afin de porter sur ses épaules seules, le fardeau qui allait venir. Comme son frère l'avait fait jadis, elle était prête.
L'on annonça l'arrivée de Monseigneur Wilgeforte, devant qui elle se fendit d'une révérence polie avant de l'accueillir.
- Monseigneur Wilgeforte, par le Très-Haut, qu'il est bon de vous revoir. Notre frère, vostre collègue, est au plus mal et nous craignons qu'il ne trépasse bientôt. Il tenaît tant à vous revoir. Avez-vous fait bonne route? Oh, quelle tristesse que nous n'ayons mieux qu'un pâté de lièvre et une rasade d'Hyprocras à vous offrir en guise de repas. Il est dans la chambre, et vous attends… _________________ Évêque Suffragant d'Orléans
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Sainte Wilgeforte

Inscrit le: 17 Juil 2009 Messages: 6071
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Posté le: Sam Juin 26, 2010 3:57 pm Sujet du message: |
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Wilgeforte n’aimait pas les adieux, écrivai-je.
Quand elle retournait en Sicile afin de passer quelques jours auprès de sa famille, elle ne fixait jamais le jour et l’heure précise de son départ et s’arrangeait toujours pour s’éclipser à un moment où personne ne prêtait attention à elle. La raison en était simple : elle trouvait stupide de passer par cette étape aussi inutile que déchirante. Ayant passé de splendides journées avec sa famille, elle n’avait nulle envie de les quitter sur une note larmoyante et préférait s’en aller en gardant fraîchement en mémoire les exceptionnels moments qu’elle avait vécus là-bas.
Non, décidément, Wilgeforte n’aimait pas les adieux.
Or, la sœur de Navigius lui avait précisément écrit afin de solliciter sa présence lors d’adieux à faire au grand aumônier. Si elle pouvait se permettre quelques inconvenances avec sa famille, il n’en allait pas de même avec le mourant qui, cela était de notoriété publique, était d’un conservatisme très fort : en une période si difficile, tout manquement de sa part aux convenances aurait poussé les di Carrenza à lui prêter des intentions qu’elle n’avait pas. Elle avait donc accepté de se rendre à Modène.
Le problème, quand on refuse de faire quelque chose, c’est que, quand on est exceptionnellement obligé de le faire, on est totalement perdu alors que ceux qui ont accepté de le faire savent s’y prendre. Telle était la situation de Wilgeforte : elle ne savait absolument pas ce qu’elle devait faire et dire à Navigius et à sa sœur. Elle qui adorait tout planifier, tout prévoir de A à Z, réfléchir à toutes les alternatives et à toutes les possibilités, elle qui était une professionnelle de la réflexion et de l’intellectualisation mais qui était un cancre de l’improvisation, du naturel, du relationnel et de l’humain n’avait rien pu prévoir.
Tout était réuni pour que Wilgeforte bouillonne. Et c’était le cas. Intérieurement. De l’extérieur, elle était pâle, calme et semblait avoir un total contrôle sur elle-même et sur les événements — comme à l’accoutumée, en somme.
Une jeune femme très mince dont la peau à la fois claire et matte indiquait la provenance méridionale et l’appartenance à la noblesse vint aux devants de la Sicilienne dans une impeccable révérence. C’était Éliséa, évidemment.
Monseigneur Wilgeforte, par le Très-Haut, qu'il est bon de vous revoir. Notre frère, vostre collègue, est au plus mal et nous craignons qu'il ne trépasse bientôt. Il tenait tant à vous revoir. Avez-vous fait bonne route? Oh, quelle tristesse que nous n'ayons mieux qu'un pâté de lièvre et une rasade d'Hyprocras à vous offrir en guise de repas. Il est dans la chambre, et vous attend…
Wilgeforte contempla un instant cette jeune femme qu’elle n’avait qu’entraperçues lors d’une visite à Navigius dont elle était la secrétaire. Elle était si jeune et son visage traduisait déjà tellement de choses. Cette épreuve, bien que terrible, n’était de toute évidence pas la première traversée et l’Italienne semblait, malgré une évidence affliction, conserver une certaine maîtrise de soi. Confusément, cela rappelait quelqu’un à Wilgeforte. Mais qui donc ?
Ma chère enfant, j’ai fait aussi vite que j’ai pu. Dès la réception de votre missive, j’ai laissé là mon emménagement en Avignon et les divers dossier réclamant mon attention. L’horreur de la nouvelle dont vous me fîtes part n’a d’égale que sa soudaineté. Soyez remerciée pour vos propositions mais, en dépit du harassant périple que je viens d’accomplir, je n’ai ni le besoin ni l’envie de me sustenter. Je vous en prie, menez-moi à monseigneur votre frère. Je suis de tout cœur avec vous dans cette terrible décision du Créateur.
Compassion, sincérité : où diable était passée la Wilgeforte dissimulatrice et distante que tous connaissaient ? Sans doute cette Wilgeforte-là était restée en Avignon, car c’en était une autre qui était à Modène ce jour là. _________________
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